Dans A Thousand Leaves, la musique part d’une tension entre des sons de provenances parfois très éloignées qu’invoquerait un poète zen dont le magnétisme parviendrait à certains moments à les entremêler.
La texture de la musique s’immisce dans celle des éléments et y introduit une dimension temporelle qui approfondit leur présence.
La voix est une ballade calme qui ne tire pas sur la respiration plus que le souffle qu’elle réserve.
L’énergie absente, on s’identifie à une lente progression, un lent réveil, à partir d’un rhythme fermé, où on enmêle ses nerfs pour créer une forme.
Vidé de son énergie, on capte dans l’environnement cette même absence, la monotonie d’un hiver indifférent aux rayons du soleil. On trouve l’énergie ailleurs que dans une positivité fermée. On trouve la possibilité de démarrer de rien lentement, puis en accélérant son rythme. L’énergie est différente de Dirty, et est plus accessible.
Pour apprécier certains moments, il faudrait se voir seul face au monde, au milieu de ses bruits. En s’observant dans le monde, on le perdrait de vue. Sa cohérence apparente dont l’habitude donne forme, échapperait à notre regard pour devenir un bruit perceptible du coin de l’oeil. En se soustrayant d’un point de vue personnel sur le monde et sa logique, on voit sa propre histoire face à des éléments en réalité dissonants, dans des interstices étrangers de la vie des gens, cherchant un espoir de pouvoir sauter dedans.
Dans Washing Machine, il n’y avait pas ces moments de brouillage qui peuplait la solitude. La solitude y était plus l’occasion de retrouver une force, une responsabilité à faire naître cette énergie adolescente, naïve, où on retrouverait des moyens simples, une puissance faite de rien. Dans Diamond Sea, la répétition rappelait le temps, les nuages, la persistance d’éléments de la réalité, et permettait la perception de cette persistence.
Comme dans beaucoup de morceaux de Sonic Youth, chacun joue et se répond invitant celui qui écoute à entrer dans le jeu, par exemple en trouvant un écho dans la réalité, dans ses pas, dans son attention sélective du monde extérieur.